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MICHAEL WOLF ▪ LA VIE DANS LES VILLES

  • Photo du rédacteur: Eric Poulhe
    Eric Poulhe
  • 11 août 2017
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 9 juin 2023

LES RENCONTRES D’ARLES, ÉGLISE DES FRÈRES PRÊCHEURS

3 juillet 2017 - 27 août 2017

Pour la première fois, en étroite collaboration avec le musée de la Photographie de La Haye, les Rencontres d’Arles présentent une vue d’ensemble du travail de création de Michael Wolf. Toute l’œuvre de Wolf est hantée par la vie dans les villes telle qu’il a pu l’observer dans des grandes métropoles comme Tokyo, Hong Kong ou Chicago.

L’artiste fait varier les points de vue afin de mettre au jour la complexité de la vie urbaine moderne. La pièce maîtresse de l’exposition est l’installation The Real Toy Story (2004), qui met en scène plus de 20 000 jouets en plastique « Made in China » trouvés dans des brocantes ou des magasins d’occasion aux États-Unis.

Au milieu de cet étalage vertigineux de jouets produits en masse pour les enfants, Michael Wolf montre des portraits bienveillants d’ouvriers chinois travaillant sur les chaînes d’assemblage et produisant des jouets destinés à satisfaire une demande mondiale hystérique en biens de consommation bon marché.


Wim Van Sinderen

 

Sélection

 

Commentaire ♥♥♥♥♥


Assurément, l’exposition de Michael Wolf présentée dans le cadre des Rencontres d’Arles, est celle qui mérite le détour. Le choix de l’église gothique désaffectée des Frères Prêcheurs comme espace d’exposition, saisit immédiatement le visiteur par la singularité du lieu, ses volumes, son atmosphère et sa lumière tamisée cherchant son chemin au milieu des voutes et des arcades en pierre. D’un seul regard semi-circulaire, on embrasse l’ensemble des zones d’exposition ; à droite le mur de jouets plastiques accrochés aux parois du chœur, à gauche les cadres grand format suspendus dans la nef, en face un peu en retrait des panneaux plus classiques de cadres photo.

La scénographie de l’exposition, a su parfaitement tirer parti du lieu en mettant en valeur, à la fois avec des images et des objets, les différentes séries réalisées par le photographe au cours des vingt dernières années. Michael Wolf, qui a longtemps vécu à Hong-Kong, propose un regard graphique emprunté de créativité et de poésie sur la place des hommes dans un monde urbain.

La plupart des visiteurs et notamment les enfants sont captivés et surpris par l’installation murale « The Real Toy Sory » composée de 20.000 jouets en plastique fabriqués en Chine, au milieu desquels ont été accrochés des portraits d’ouvriers pris sur leur lieu de travail. Ce montage très spectaculaire, relève finalement plus du « happening » militant que de l’exposition photo contemplative, car il prétend dénoncer l’esprit de consommation de nos sociétés urbaines.

Par une recherche graphique de ses tirages, Michael Wolf présente une vision très personnelle de l’architecture et de l’urbanisme, amenant le spectateur à réfléchir sur sa place dans la société. Il donne ainsi une autre vision de Paris en photographiant les toits des immeubles dans une approche graphique presque abstraite.

La série de grands formats « Architecture of Density » montre la densité verticale écrasante des immeubles de Hong-Kong. De loin, on ne voit plus une photo d’immeuble, mais une toile abstraite composée de formes géométriques et de rubans de couleur parfaitement associés.

La série « Corner Houses », réalisée également à Hong-Kong, met en exergue des opposés : l’ancien et le moderne, l’ordre et le désordre, le propre et le sale. En regardant ces photos, on a l’impression de vivre la scène en se trouvant dans la rue à la place du photographe face à cet immeuble d’habitation.

En racontant des histoires, Michael Wolf s’attache à montrer la fragilité des personnages pris dans le cadre de scènes de vie ordinaires. Dans la série « Compression of Tokyo », il surprend les passagers comprimés dans une rame de métro et photographie leurs visages écrasés sur la vitre. Insolite et drôle à la première lecture, la vision de ces clichés donne une sensation de gêne et d’impudeur vis-à-vis de ces personnes en situation de faiblesse, prises à leur insu dans une posture inconfortable, sans qu’elles puissent ni s’échapper ni se défendre.

Le photographe renouvelle une expérience similaire à Chicago en réalisant une série d’images d’immeubles de verre prises au téléobjectif depuis un autre immeuble. Les scènes de vie ordinaire, dont le décor est un appartement ou un bureau, semblent appartenir à différents tableaux de scènes de théâtre. Chacun vaque à ses occupations dans un périmètre personnel limité, indépendamment de son voisin qui en fait de même, sans qu’il n’y ait aucune interaction.

Toujours à la recherche de saisir les gens dans leur cadre de vie ordinaire, Michael Wolf a également réalisé avec beaucoup de sensibilité une série de portraits de personnes âgées photographiées de face dans les logements sociaux de Hong-Kong qu’elles habitent. De manière pertinente et très illustrative, les clichés sont exposés en marge de la nef, sur les parois d’u cube à la dimension exacte de leur logement. On est fasciné par la simplicité de la mise en scène et du dénuement apparent des personnages, au regard de la multitude d’objets souvent en désordre composant l’environnement exigu dans lequel ils vivent.

Par le travail constant qu’il a réalisé depuis vingt ans autour de la place de l’être humain dans l’environnement urbain dans lequel il évolue, Michael Wolf est en fait plus qu’un photographe. Il apporte une vision sociologique qui ne peut qu’interpeler le citadin qui regardera ses clichés.

E.P.


 
 
 

EXPO PHOTO

© 2017 Eric Poulhe Photographie

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