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SUSAN MEISELAS ▪ MEDIATIONS

  • Photo du rédacteur: Eric Poulhe
    Eric Poulhe
  • 4 mai 2018
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 9 juin 2023

JEU DE PAUME, PARIS

6 février 2018 – 20 mai 2018

Cette rétrospective consacrée à la photographe américaine Susan Meiselas (1948, Baltimore) réunit une sélection d’œuvres des années 1970 à nos jours. Membre de Magnum Photos depuis 1976, Susan Meiselas questionne la pratique documentaire. Elle s’est fait connaître par ses images sur les zones de conflit en Amérique centrale dans les années 1970 et 1980, notamment grâce à la force de ses photographies couleur.

Couvrant de nombreux sujets et pays, de la guerre aux questions des droits de l’homme, de l’identité culturelle à l’industrie du sexe, elle utilise la photographie, le film, la vidéo et parfois des matériaux d’archives dans une volonté constante de construire des récits auxquels elle associe ses sujets en tant qu’acteurs.

L'exposition, la plus complète qui lui ait jamais été consacrée en France, met en évidence cette démarche unique de Susan Meiselas qui traverse les conflits dans le temps avec une approche personnelle autant que géopolitique et questionne le statut des images par rapport au contexte dans lequel elles sont perçues.

Pour le Jeu de Paume, elle a créé une nouvelle œuvre, commencée en 2015 et inspirée par son engagement auprès de Multistory, association basée au Royaume-Uni. Cette dernière série réalisée dans un foyer pour femmes, A Room of Their Own, porte à nouveau sur le thème de la violence domestique, cette fois en Angleterre. L’installation comprend cinq récits en vidéo qui présentent les photographies de l’artiste, des témoignages de première main, des collages et des dessins.


Carles Guerra et Pia Viewing, commissaires

 

Sélection

 

Commentaire ♥♥♥♥♥

Le musée du Jeu de Paume présente une rétrospective de la photographe reporter américaine Susan Meiselas notamment connue pour ses photos de guerre au Nicaragua.

L’exposition est organisée en trois parties. La première salle est consacrée à ses premières œuvres en noir et blanc réalisées à New-York et aux Etats-Unis. La deuxième salle est dédiée à son travail de reporter de guerre en Amérique Centrale dans les années 1970 et 1980, et au Kurdistan de 1991 à 2007. Enfin la dernière salle présente son travail plus social autour des violences domestiques et de l’industrie du sexe.

C’est par une exploration de son environnement proche que Susan Meiselas début dans la photographie avec la série « 44 Irving Street » réalisée en 1971. Elle réalise des portraits des habitants de l’immeuble dans lequel elle habitait quand elle était étudiante. Chaque cliché est réalisé avec le locataire, homme ou femme, installé dans un coin de la chambre ou de la pièce unique. Les photos sont présentées avec un texte manuscrit du locataire qui décrit la relation qu’il entretien avec son logement ou l’environnement dans lequel il vit. On sent bien dans chaque photo que Susan Meiselas a une relation très personnelle avec les personnes qu’elle photographie, relation d’autant plus proche qu’elle habite elle aussi dans le même immeuble.

On retrouve cette même proximité avec les personnages de la série « Prince Street Girls ». Réalisé à New-York dans le district de Little Italy où Susan Meiselas habite encore, le projet s’étale sur une longue période allant de 1975 1990. En 1975, elle photographie en noir et blanc des bandes de filles trainant ensemble dans la rue. Elles avaient alors entre huit et dix ans. Au cours des années, on voit l’évolution du corps des jeunes filles qui deviennent femmes, et leur changement de vie dans ce quartier qu’elles n’ont pas quitté.

Le cœur de l’exposition se trouve dans la deuxième salle qui retrace le travail de reporter de guerre de Susan Meiselas. Une énorme fresque murale présente l’ensemble de ses déplacements et reportages réalisés en Amérique Centrale. La fresque se lit verticalement et horizontalement. Horizontalement, sont présentés les faits de façon chronologique de 1978 à 1985. Verticalement, la fresque est décomposée en trois parties. Le haut présente les photos telles qu’elles ont été présentées par les Médias. La bande du milieu présente les tirages originaux. La partie basse présente des photos inédites non publiées qui complètent les tirages qui ont été publiés dans la presse. Pendant ces conflits, Susan Meiselas s’immerge complètement dans son environnement en suivant au plus près les troupes Sandinistes. Certaines de ses photos comme celle du soldat Sandiniste lançant un cocktail Molotov, auront valeur d’icônes de la révolution sandiniste.

Ses reportages au Kurdistan relèvent d’un travail d’archive de la mémoire collective post-conflit. Les clichés présentés sont de grand format en couleur et d’une très grande force. Ils expriment toute la détresse d’un peuple Kurde qui a payé un lourd tribut au génocide ordonné par Saddam Hussein en 1988 dans le nord de l’Irak. La photographe veut délivrer un témoignage des crimes de guerre, comme la photo qu’elle a réalisée d’une femme décontenancée mais digne au moment de l’exhumation des restes humains d’une fosse commune.

Pour terminer, l’exposition présente le travail de Susan Meiselas autour de l’exploitation de la femme et des violences qu’elle peut subir. Sollicitée en 1992, la photographe intervient dans le cadre d’une campagne dénonçant la violence domestique à San Francisco. Elle réalise une série de collages, juxtaposant des rapports de police avec les photographies de scènes de crime, qui seront exposées dans certains espaces publics.

Pour son travail autour de l’industrie du sexe, on entre dans une dernière salle en écartant un rideau noir comme si on entrait dans un commerce du sexe. Pour sa série « Carnival Strippers », Susan Meiselas a suivi pendant trois étés consécutifs entre 1972 et 1975, les strip-teaseuses d’une fête foraines se déplaçant en Nouvelle-Angleterre. Elle photographie les femmes sur scène mais surtout dans leur quotidien, dans les coulisses, à l’hôtel. Les photos montrant des femmes nues ne sont jamais vulgaires. Elles sont juste un témoignage de leur travail et des relations qu’elles entretiennent entre elles, sans rien dissimuler. Afin de donner encore plus de réalisme au sujet, les photos sont accompagnées d’un enregistrement sonore où l’on entend les strip-teaseuses, les managers et les spectateurs.

Par son approche humaine, Susan Meiselas a toujours privilégié ses projets ou ses reportages à travers les sujets qu’elle photographie et avec lesquels elle établit une relation de proximité très proche, voire intimiste. On sent une réelle empathie avec eux. Le logement à New-York est traité par les portraits de ses locataires. L’adolescence est abordée à partir de l’accompagnement dans la durée d’une bande de copines. La guerre, ses violences et ses atrocités, sont dénoncées aux côtés des combattants ou des victimes civiles. L’industrie du sexe est présentée sous l’angle des strip-teaseuses. En fait, Susan Meiselas est une photographe qui apporte son témoignage sur la condition humaine.


E.P.


 
 
 

EXPO PHOTO

© 2017 Eric Poulhe Photographie

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