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SABINE WEISS ▪ LES VILLES, LA RUE, L’AUTRE

  • Photo du rédacteur: Eric Poulhe
    Eric Poulhe
  • 17 sept. 2018
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 9 juin 2023

CENTRE POMPIDOU, PARIS

20 juin 2018 – 15 octobre 2018

Sabine Weiss publie son premier reportage photographique à vingt et un ans, en 1945. À vingt-neuf, elle participe à l’exposition Post-War European Photography au MoMA New York et rejoint l’agence Rapho. Un an plus tard, l’Art Institute of Chicago lui consacre une exposition individuelle qui fera le tour des États-Unis. L’année suivante, en 1955, trois de ses photographies figurent dans l’exposition The Family of Man au MoMA. Sabine Weiss est aujourd’hui la dernière représentante du grand courant de la photographie humaniste.

Au travers de cette exposition qui couvre la période 1945-1960, correspondant aux années confuses et précaires de l’après-guerre, le Centre Pompidou propose une nouvelle lecture des photographies de Sabine Weiss, appartenant à un courant injustement perçu comme « sentimentaliste ». Son œuvre riche et variée, dévoilant un regard inédit sur son travail à partir de ses propres archives, témoigne d’un engagement en faveur d’une réconciliation avec le réel.

Née en 1924, en Suisse, Sabine Weiss s’intéresse très tôt à la photographie et décide de faire de sa passion un métier. Durant la guerre, elle est apprentie au studio Boissonnas, à Genève, et décide de s’installer à Paris après la capitulation. Elle travaille quelques années avec Willy Maywald qui l’introduit dans le milieu de la mode et de la haute société parisienne. Peu après, elle devient photographe indépendante et publie abondamment dans la presse illustrée : Paris Match, The New York Times, Life, Picture Post, Die Woche. Elle travaille également pour l’édition française de Vogue tout au long des années 1950 et réalise des reportages à l’étranger et des publicités pour de grandes agences de communication.

En parallèle, Sabine Weiss se consacre à des travaux plus personnels. Elle photographie des enfants jouant dans les terrains vagues de son quartier, Porte de Saint-Cloud mais aussi la ville de Paris, son quotidien, son métro, ses marchés aux puces… Elle pose un regard à la fois doux et compréhensif sur les habitants de sa ville, à la recherche des beautés simples des moments suspendus, de repos ou de rêverie. Ses œuvres sont pleines de lumière, de jeux d’ombres et de flous.

Les photographies de Sabine Weiss, issues d’un don et d’un achat récent, dialoguent avec celles de quatre artistes contemporains – Viktoria Binschtok, Paul Graham, Lise Sarfati et Paola Yacoub – travaillant sur la thématique de la rue et de la ville contemporaines. Leurs approches radicalement différentes permettent de poser un nouveau regard sur l’œuvre de la photographe humaniste.


Karolina Ziebinska-Lewandowska, commissaire d’exposition

 

Sélection

 

Commentaire ♥♥♥♥

Il n’est pas nécessaire de présenter l’illustre photographe humaniste qu’est Sabine Weiss. Née en 1924, elle dévoile, à l’occasion de cette exposition, un autre regard sur son travail et les années délicates de l’après-guerre. Dès les années 50, elle réalise des reportages sur commandes, pour de grands magazines comme Paris-Match ou l’édition française de Vogue. Mais en parallèle, elle travaille sur des projets plus personnels en photographiant son quartier, ses habitants et des enfants qui jouent dans les terrains vagues des anciennes fortifications. Pour cette exposition, Sabine Weiss a sélectionné des photos, quelques fois inédites, sur la thématique de la rue et de la ville, entre Paris, New York et Moscou.

L’humain est toujours présent dans une image toujours pleine de sensibilité. Parfois les situations sont cocasses comme ces deux photos réalisées à Moscou qui fonctionnent de concert. La première photo montre dans un jardin public, deux femmes submergées derrière deux énormes grappes de ballons de baudruche. Sur la seconde photo, deux militaires russes se promènent certainement dans ce même jardin, avec à la main deux ballons de baudruche, qui leur ont été vraisemblablement donnés par les deux femmes.

A New York, deux photos prises à Manhattan montrent des oppositions. Sur la première, on voit une employée en grève qui semble fatiguée et résignée. Elle est assise devant la vitrine d’un magasin de luxe présentant un mannequin dans une robe longue. En quelque sorte, le prolétariat versus l’opulence… L’autre image montre un homme avec un chapeau de fête, à Times Square, soufflant dans ce qui peut être une trompette, alors qu’un autre homme à l’arrière-plan attire l’attention du photographe en levant les bras. Le premier rôle et le second…

A Paris, Sabine Weiss photographie les personnages qu’elle côtoie dans son quartier. Elle aime beaucoup jouer avec les contre-jours, l’ombre et la lumière comme cette image du jardin du Luxembourg. Elle a choisi en premier plan, deux chaises en fer vides avec leur ombre portée en direction du photographe représentant trois-quarts de l’image, et en second plan une rangée de personnages alignés fermant la perspective. Et bien sûr, il y a ce cliché très célèbre de l’homme courant sur une rue pavée dans la nuit pris en lumière naturelle avec l’éclairage public. Le noir et blanc met encore plus en valeur ces contrastes.

Sabine Weiss aime aussi jouer avec les photos prise derrière les vitres, les miroirs ou les reflets. En bords de Seine, la photo de trois pêcheurs inverse les codes. On voit la silhouette complète des trois personnages en reflet dans une flaque d’eau. En lecture directe, sur le bord supérieur de la photo, on a uniquement leurs pieds qui ont été coupés au niveau des chevilles, et nous ramènent à la réalité.

Toutes les photos de Sabine Weiss racontent une histoire. Dans certaines scènes, elle capte des séquences découpant l’histoire en plusieurs clichés comme ce triptyque pris à Longchamps où l’on voit des spectateurs turfistes captivés regardant la course. D’abord le regard se tournant à gauche, puis de face, et enfin se terminant à droite. Même sans voir les chevaux, on peut aisément imaginer la scène sur la piste.

Le commissaire de l’exposition a choisi de faire dialoguer les photographies de Sabine Weiss avec celles de quatre photographes contemporains, Viktoria Binschtok, Paul Graham, Lise Sarfati et Paola Yacoub, travaillant sur la thématique de la rue et de la ville contemporaines. Leur approche est radicalement différente. Les images sont en couleur et pour certaines en grand format. Pas sûr qu’il s’en dégage autant d’émotion, que dans les clichés de la photographe humaniste de quatre-vingt-quatorze ans, que l’on peut toujours croiser à l’occasion d’une exposition de son travail.

Un seul regret. Qu’il n’y ait pas plus de photos !


E.P.


 
 
 

EXPO PHOTO

© 2017 Eric Poulhe Photographie

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