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Photo du rédacteurEric Poulhe

LOVE ▪ REN HANG

MAISON EUROPÉENNE DE LA PHOTOGRAPHIE, PARIS

6 mars 2019 – 26 mai 2019

L’exposition « LOVE, REN HANG » présente pour la première fois en France l’œuvre d’un des artistes chinois les plus influents de sa génération.

Avec une sélection de 150 photographies issues de plusieurs collections d’Europe et de Chine, l’exposition « LOVE, REN HANG » occupe tous les espaces du deuxième étage de la MEP.

Composée essentiellement de portraits – d’amis, de sa mère ou de jeunes chinois sollicités sur internet – mais également de paysages et de nus, l’œuvre de Ren Hang est immédiatement reconnaissable. Ses photographies, si elles semblent mettre en scène ses sujets, sont pourtant le fruit d’une démarche instinctive. Leur prise de vue, sur le vif, leur confère légèreté, poésie et humour.

À travers une approche chromatique, l’exposition propose une plongée dans les différentes constellations oniriques de l’artiste : la présence du rouge, les couleurs acidulées, une salle consacrée à sa mère, une autre, plus sombre, dédiée à des prises de vue nocturnes. Enfin, une dernière salle rassemble ses travaux plus « osés », sur le corps, créant un lien, fort et organique, entre l’érotisme et la nature. Ren Hang questionnait, avec audace, la relation à l’identité et à la sexualité. Artiste homosexuel, particulièrement influent auprès de la jeunesse chinoise, son ton considéré comme subversif ou qualifié de pornographique, représentait vis à vis d’un contexte politique répressif, l’expression d’un désir de liberté de création, de fraîcheur et d’insouciance. Sa vision, unique, faisait référence au « réalisme cynique » (mouvement artistique chinois né des événements de Tian’anmen en 1989).

Présentés en regard de cet important corpus photographique, de nombreux écrits de Ren Hang, qu’il partageait régulièrement sur son site internet, témoignent de son combat contre la dépression. « Si la vie est un abîme sans fond, lorsque je sauterai, la chute sans fin sera aussi une manière de voler ». L’artiste s’est donné la mort en 2017, à l’âge de 29 ans. Il avait été exposé dans de nombreuses galeries à travers le monde, et était régulièrement publié dans des magazines de mode tels que Purple et Numero.

 

Sélection

 

Commentaire ♥♥♥♥

Avec « Love, Ren Hang », la Maison européenne de la Photographie présente, au travers de 150 photographies issues de plusieurs collections d’Europe et de Chine, l’œuvre du photographe chinois, Ren Hang. La carrière de ce jeune artiste, malheureusement de courte durée, prend fin en 2017 à Pékin, quand il se suicide par défenestration à vingt-neuf ans.

Autodidacte, Ren Hang commence la photographie en 2008 et réalise essentiellement des photos de nus. Homosexuel, il est particulièrement influent auprès de la jeunesse chinoise, et privilégie aussi bien les images masculines que féminines, en solo, en groupe, par genre ou mixte. Il a une approche très instinctive et traite les corps des hommes et des femmes avec beaucoup de désinvolture et d’humour. Il utilise un appareil argentique léger et maniable qui lui permet de prendre les photos librement et rapidement sans éclairage spécifique. L’utilisation du flash de base de l’appareil surexpose parfois les visages ou les corps nus, mais la qualité du cadrage et de la composition prend le dessus et fait oublier ce défaut. Une vidéo présentant le « off » de son travail montre une ambiance très décontractée où ses modèles, pour la plupart des proches ou des connaissances, se livrent avec complicité à toutes ses excentricités. Même sa mère s’est livrée au jeu de passer devant l’objectif.

Il ne se fixe aucune barrière. Il mêle les corps et recherche des postures originales qui interpellent et interrogent dans leur lecture. Certaines compositions sont empruntées de beaucoup de poésie, mais certaines images provocantes peuvent être qualifiées de pornographiques, les sexes dévoilés sans aucune retenue. Quelque part, ses clichés sont le reflet de ses tourments et de ses angoisses qui l’amèneront jusqu’à l’issue fatale.

Compte tenu du sujet traité et des images crues qu’il réalisait, son travail en Chine n’était pas aisé. Les autorités ont considéré certaines images pornographiques et ont même annulé une de ses expositions pour cette raison. Ren Hang a décidé d’y répondre en maintenant l’exposition, mais en y accrochant des cadres vides. Si en Chine, son travail n’était pas reconnu par le pouvoir et la société, il a eu un certain succès à l’étranger en exposant dans des galeries à Paris, Stockholm et Los Angeles. L’éditeur Taschen a également publié un ouvrage regroupant l’ensemble de sa carrière courte mais intense.

Que dire de son œuvre, poétique, originale, érotique, pornographique ? Chacun pourra se faire son idée en venant découvrir ses photographies à la MEP, au risque toutefois d’être choqué par le diaporama projeté dans la dernière salle…

E.P.


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