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Photo du rédacteurEric Poulhe

CLAUDE BATHO & ERICA LENNARD ▪ LA VIE DES FEMMES

LA GALERIE ROUGE, PARIS

8 juin 2023 – 23 septembre 2023

La Galerie Rouge est heureuse de réunir dans une même exposition, Claude Batho & Erica Lennard, deux photographes qui ont, chacune à leur manière, créé une œuvre puissante, féministe et introspective dans les années 1970 en France. Leurs regards, tournés vers la sphère de l’intime, révèlent le temps qui passe, celui de vies et d’œuvres en construction. Leurs photographies, à l’identité forte et distincte, apparaissent aujourd’hui éminemment contemporaines et avant-gardistes.

L’œuvre de Claude Batho se situe dans le cadre familial et intime. Sans romantisme, avec simplicité et pudeur, elle photographie son quotidien, ses deux filles, les objets et les lieux qu’elle chérit. Elle y présente son existence de femme, notamment les tâches ménagères – le linge mouillé, les draps repassés –, et l’interdépendance des choses et des êtres comme ce portrait du père « aveuglé » par la lumière entrée par une fenêtre. Claude Batho s’intéresse particulièrement à ce pouvoir magique qu’a la photographie de retenir les instants, le temps qui passe et les êtres chers. Une qualité photographique qui nous fait plonger immédiatement – en tant que spectateurs – dans son univers, à la fois familier et lointain, sans appréhension et guidés simplement par la poésie du quotidien. Claude Batho disait ainsi « Ces photographies sont trop proches, trop intérieures pour qu’avec elles je puisse prendre de la distance. Elles sont remplies du temps qui passe, sur les enfants, les gens et les choses. J’ai voulu rendre sensibles des instants très simples, en retenir les silences… » Ce rapport au temps prend un sens particulier dans ses photographies puisque Claude Batho, atteinte d’un cancer en 1976, accomplit en quelques années une œuvre considérable, simple et complexe, où elle photographie son existence tout en engageant une réflexion sur la nature même de la photographie.

Erica Lennard réalise sa série Les Femmes, les Sœurs, entre les Etats-Unis et l’Europe alors qu’elle est une jeune femme de 20 ans. Venue de Californie et installée à Paris en 1973, elle y photographie sa sœur cadette Elizabeth, ses amies et les femmes qu’elle rencontre et admire. Ces portraits de femmes sont à la fois une ode au pouvoir et à la beauté des femmes et une quête d’identité à un âge où Erica Lennard cherche de nouveaux modèles féminins et commence son œuvre photographique. Vivant une existence proche de la bohème, entourée d’artistes et d’écrivaines, les décors qu’elle choisit sont éminemment beaux et romantiques : le site archéologique de Lindos en Grèce, la Camargue en été, un appartement haussmannien quasiment vide, les rues de Paris, et des jardins à la française. Elle y photographie des femmes non pas comme objets de désir mais comme sujets de leurs propres désirs et revendique par là une liberté de vie et de pensée à un moment où la lutte pour les droits des femmes s’intensifie en France. La photographe fait ainsi le portrait d’une sororité qui célèbre la pluralité et la richesse des existences féminines. Erica Lennard écrit dans Les Femmes, Les Sœurs « Je vais avec toi et seule dans l’heureuse lumière des heures accomplies ; Sans être à moi pareille, toi tu es mon reflet en ces images. Elizabeth et moi sommes sœurs. Nous sommes toutes sœurs. ».


La Galerie Rouge

 

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Commentaire ♥♥♥♥♥


La Galerie Rouge réunit dans une même exposition, « La vie des femmes », Claude Batho et Erica Lennard, deux photographes qui ont, chacune à leur manière, créé une œuvre puissante, au regard féministe et introspectif des années 1970 en France. Leurs parcours semblent toujours se répondre, se suivre et s’accompagner. Erica Lennard est exposée en 1976, Claude Batho en 1977, tandis que leurs livres respectifs paraissent au même moment aux Éditions des femmes.

Claude Batho photographie son quotidien, ses filles, dans le cadre familial à Paris ou à Héry, à proximité d’Auxerre. Ses clichés, sont très épurés, empruntés d’un certain romantisme. Ceux dénués de présence humaines tirent vers le genre de la nature morte provoquant un sentiment de proximité et de familiarité.

Erica Lennard photographie d’abord sa sœur, puis ses amies, puis les femmes qu’elle rencontre dans des décors symboliques : un site archéologique en Grèce, un appartement typiquement haussmannien, les plages de Camargue, un jardin bucolique. Ses portraits de femmes renforcent la sororité omniprésente des années 1970, que ce soit dans la complicité évidente avec sa sœur ou une proximité suggérée avec des figures féminines de l’époque comme Jeanne Moreau. Ses photographies de nus semblent ne pas être composées, comme volées, et pourtant elles dégagent une grande sensualité renforçant ce sentiment que les femmes photographiées assument totalement l’image qu’elles offrent à l’objectif. Ceci n’a rien d’étonnant quand on sait qu’Erica Lennard a été éditée dans une maison fondée par Antoinette Fouque, figure historique du Mouvement de libération des femmes.

Une belle exposition mise en valeur et en perspective par une galerie, quelque part militante pour la préservation du droit des femmes.


E.P.


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