FRANK HORVAT ▪ L’IMPRÉVISIBLE
- Eric Poulhe
- 27 oct. 2022
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 9 juin 2023
LES DOUCHES LA GALERIE, PARIS
9 septembre 2022 – 29 octobre 2022

Dans les années cinquante et soixante – et bien après également – être photographe « de mode » signifiait obligatoirement travailler en studio en respectant nombre de codes qui permettaient de « bien montrer » le vêtement, par la répétition des poses et le cadrage de détails, entre autres. Frank Horvat, lui qui aimait capter l’animation de la rue parisienne, la mettre en forme, la résumer en un instant, fut le premier à faire sortir les mannequins dans la rue, à les intégrer à la vie courante, à s’amuser.
Né en 1928 en Italie de parents médecins, juifs et originaires d’Europe centrale, Frank Horvat vit successivement en Suisse, en Italie, au Pakistan, en Inde, en Angleterre et en France, où il s’installe à la fin des années 1950, tout en se rendant régulièrement aux États-Unis et en voyageant souvent en Europe, dans les Amériques et en Asie. Lui qui prit ses premières photographies en Italie dans une tonalité humaniste fut définitivement marqué par sa rencontre, à Paris, avec Henri Cartier-Bresson qui le convainquit d’adopter le Leica et de partir pour l’Inde.
Rétif à toute étiquette, si ce n’est celle de photographe, il s’est, toute sa vie, passionné pour la nature, les limites, les possibles de la photographie. En témoigne sa collection personnelle, débutée il y a plus de 40 ans par échange avec ses pairs, et qui nous propose à travers près de 500 tirages, une sélection habile de ce qu’il considère comme les meilleures œuvres d’une large sélection de photographes renommés.
Sous le regard du plus Parisien des Italiens, on ne pense plus à la photographie « de mode ». On s’attache simplement à suivre le regard d’un photographe qui sait mettre à profit des formes inventées par d’autres, des corps dans l’espace, des contrastes de lumière pour composer des rectangles au rythme ample, harmonieux. Une photographie également derrière laquelle on sent le plaisir éprouvé par l’opérateur qui s’émerveille toujours des surprises que peut lui réserver l’outil qu’il s’est choisi et qu’il s’approprie bien loin des règles établies. Comme dans sa définition favorite : « Une bonne photo, c’est une photo que l’on ne peut pas refaire. Une photo doit être imprévisible et tout ce qu’il y a dedans doit être nécessaire. »
Christian Caujolle
Sélection
Commentaire ♥♥♥♥♥
Les Douches la Galerie présente le travail du photographe français d'origine italienne Frank Horvat, décédé le 21 octobre 2020 à Boulogne-Billancourt. Après sa rencontre déterminante avec Henri Cartier-Bresson en 1950, il acquiert, dans les années 1960, une renommée internationale avec ses photographies de mode renouvelant le genre. Au regard de la richesse et de la diversité de son œuvre, c’est l’angle de vue de la mode qui a été privilégié dans cette exposition.
En faisant sortir les mannequins dans la rue à la fin des années 1950, Frank Horvat a fait sensation en cassant les codes de l’époque. La mode dialogue désormais avec la vie. Il photographie ainsi Anna Karina au milieu des bouchers des Halles de Paris, Rosalind Watkins au milieu d’enfants d’un quartier ouvrier du Yorkshire, Monique Dutto à une sortie de métro au milieu d’usagers des transports anonymes. Sur la plateforme extérieure arrière d’un bus parisien ou sur les trottoirs de l’avenue des Champs Élysées, les images de mannequin en robe de mariée seront sa marque de fabrique.
En attendant une rétrospective qu’on espère prochaine dans un bel espace d’exposition, une belle mise en bouche.
E.P.
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