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Photo du rédacteurEric Poulhe

PHILIPPE CHANCEL ▪ WELCOME TO PARADISE

POLKA GALERIE, PARIS

10 mars 2023 – 6 mai 2023

« J’ai voulu me rendre compte. Aller voir par moi-même. M’assurer qu’on est bel et bien dans ce monde-là. »

Philippe Chancel mène, depuis ses débuts dans les années 1980, une exéprience photographique au croisement de l’art documentaire et du journalise. Sa quête ? Observer les symptômes les plus alarmants u déclin de notre planète, mettre en lumière la beauté malade d’un désastre à venir.

Parmi ses voyages, entre fascination et répulsion, des endroits à part et secrets, impénétrables. La Roumanie de Ceaucescu (1982), la Corée du Nord (2005-2014), les coulisses des chantiers monstres aux Émirats arabes unis (2007-2011). On passe des dernières idéologies communistes aux premières idéologies de l’argent. On croise les soldats esclaves de ces mondes verrouillés où il faut bien survivre. Mais aussi ces coins « les plus pourris de la planète », où les hommes subissent le courroux de la nature, quand ce n’est pas l’inverse.

L’exposition « Welcome to Paradise » pioche dans la mémoire visuelle de Philippe Chancel, à la recherche des œuvres les plus marquantes d’une fresque dystopique où surgissent les zones brûlantes, magnétiques qui composent un rapport méticuleux et circonstancié sut l’état de dégradation de notre monde. C’est le cœur du projet Datazone, le grand récit de Chancel, exposé aux Rencontres d’Arles en 2019.

De Haïti (2011) au Kazakhstan (213-2018), de la vallée du Jourdain (2014) à la péninsule antarctique (2017), de Fukushima (2011) à Marseille (2017-2019) en passant par Flint (2015), Chancel explore sans relâche une constellation de destinations extrêmes. Certaines sont totalement surexposées, d’autres échappent aux radars médiatiques. Toutes racontent les signes tangibles d’une catastrophe – économique, politique, écologique – alimentée par une mondialisation toxique. Comme l’écrit Michel Poivert, « c’est le monde entier qui hurle à nos yeux. Et aucun refuge n’est en vue. »

À l’heure des choix majeurs de civilisation, la photographie devient une arme de combat. Un outil de confrontation qui doit bousculer, quand la prise de conscience ne suffit plus. Philippe Chancel interpelle le spectateur : lui seul peut-être saura s’extirper de l’enfer et reretrouver le chemin du paradis.


Polka Galerie

 

Sélection

 

Commentaire ♥♥♥♥♥


La galerie Polka présente l’exposition de Philippe Chancel, Welcome to Paradise, qui reprend les images de quelques reportages significatifs du photographe documentaliste.

Depuis 1982, Philippe Chancel cherche à photographier la beauté du désastre en diagnostiquant les maux de la planète. En conséquence, il se rend là où survivent et s’épanouissent les idéologies qui détruisent le monde. « J’ai voulu me rendre compte. Aller voir par moi-même. M’assurer qu’on est bel et bien dans ce monde-là. » dit-il.

En Corée du Nord (2005-2011), Philippe Chancel photographie la démesure du pouvoir communiste et des grands rassemblements, où le kitsch est roi. Aux Émirats arabes unis (2007-2011), c’est l’idéologie de l’argent qu’il montre et la mégalomanie qu’il dénonce par l’image. Avec le projet In Tourist, il remet en perspective les prises de vues qu’il a réalisées en 1982 à Bucarest en Roumanie, avec celles des Émirats arabes unis faites 25 ans plus tard. Il retrouve les mêmes attitudes des travailleurs, les vendeurs Roumains allongés en espérant vendre leurs maigres marchandises, les ouvriers immigrés sur les chantiers, majoritairement asiatiques, s’effondrant de fatigue à chaque pause en recherche de fraicheur. En 2014, à la frontière israélo-jordanienne, Philippe Chancel photographie le Jourdain qui irrigue une vallée marquée par les soubresauts de l’Histoire, et dans les environs de Bethléem, l’envolée des colombes grises est porteuse d’espoir. À Marseille, il montre la fracture sociale entre le Nord et ses cités accrochées à la rocaille, et le Sud où on respire le bon air. Au Japon, en 2011, la proue de l’Asia Symphony, encastrée sur un quai du port de Kamaishi illustre l’impuissance des hommes face aux forces irrésistibles de la nature.

Avec Philippe Chancel, la photographie devient une arme de combat qui interpelle et bouscule le spectateur, pour une prise de conscience et un changement de comportement. Ce vœu, certainement vain, a le mérite d’exister.


E.P.


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